DoSSIER
journal du Barreau de Marseille
numéro 2 - 2015
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Le traditionnel concours de la
Conférence du Jeune Barreau de
Marseille s’est déroulé lundi 16 mars
2015 à la Maison de l’Avocat. 22
candidats ont eu l’occasion de mettre
en valeur leur capacité à plaider et à
susciter l’adhésion du public. Le jury
était présidé par Monsieur le Bâtonnier
Georges Lecomte et composé de Maîtres
Nathalie Olmer, Chantal Fortuné,
Philippe Cornet, Julia Braustein,
Charles Trolliet-Malinconi et Thomas
Gagossian (1er lauréat 2014).
À l’issue de la journée du Jeune
Barreau qui s’est tenue le mercredi 18
mars 2015, le Président du Jury,
représentant le Bâtonnier en exercice
Fabrice Giletta,
a annoncé les résultats de ce concours
d’éloquence. Cette année, trois jeunes
femmes ont été élues meilleures
candidates. Le titre de 1er Lauréat a été
décerné à Maître Sarah Zenou, le titre
de 2e Lauréat à Maître Nathalie Fouque
et le titre de 3e Lauréat à Maître Julia
Sépulcre. Les trois candidates avaient
choisi le même sujet « Je suis Charlie »
parmi les 7 proposés. Elles l’ont traité
chacune de manière passionnée.
Sarah Zenou, c’est une petite voix qui fait passer unmessage
fort, rythmé par des BANG BANG, qui martèlent son propos
comme dans le Boléro de Ravel, comme dans le chef d’œuvre
de Picasso :
ConCours 2015 dE LA ConFErEnCE du jEunE BArrEAu
MoRCEAuXCHoISISDESTRoISDISCouRS
« . . . Je vous demande de fermer les yeux et d’imaginer Guer-
nica. Entendez : une explosion. Terrible. Des cris percent. Des
balles fusent. Des corps tombent. Cassés. Des visages, de larmes
ravagés. On souffre. On a mal à notre âme meurtrie par la vio-
lence des armes qui nous assassinent. L’assourdissant reten-
tissement médiatique relaye frénétiquement les noms de ceux
qui ont été visés, les uns, après les autres, dans une cadence
qui nous sidère et nous fait tourner la tête. Un monde vient
d’être transfiguré à jamais. Une dernière détonation, sourde,
un sifflement, puis... le silence.
Le Parquet vient de prendre ses réquisitions. C’est le choc. Au
début on n’y croit pas. On se dit qu’il s’agit d’une mauvaise
blague et que « Non, vraiment, il n’a pu faire ça, pas pour un
tableau tel que celui-là ! ». À l’entendre, il y voit quelque chose
de gravissime que tous nous ne voyons pas…Et nous en défen-
se, on est comme Malevitch devant une toile blanche.
Mais rapidement, commence à s’esquisser le croquis de notre
défense: « Mais qui c’est celui-là ? Comment peut-il faire ça ?
Il se prend pour le bras armé de D. ou quoi ?! ». Alors, allons-
y ! Vautrons-nous dans les amalgames ! Tirons la sonnette
d’alarme ! Branchons les gyrophares ! Terminée la délinquance !
Terminée la criminalité ! On va venger notre Liberté ! Mais qui
sommes-nous pour laisser faire, hein ? Nous sommes Charlie !
Ah l’opinion, « Cette prostituée qui tire le juge par la manche »
pour reprendre les mots célèbres de notre Confrère Moro-Giaf-
feri, elle devient le cheval de Troie des réformes tartes à la
crème, des poncifs qui n’ont leur place que dans une dictature,
et des lois de circonstances qui nous inquiètent. Tocqueville
nous avait pourtant prévenus : vous sacrifierez vos libertés au
profit de la sécurité ! Ce qu’il n’avait pas anticipé, c’est que
tout cela serait fait au nom même de la Liberté.
BANG. BANG . . . »
Nathalie OLMER,
Membre du Conseil de l’Ordre