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mentaire pour l’enfant. J ’ai perdu de vue la nature d’ordre public de cette obligation et lorsque nous sommes arrivés devant le juge, celui-ci a refusé d’homologuer l’accord. J e m’en suis terriblement voulu d’avoir été débordée par l’émotion et la situation de ces gens. L’erreur a pu être facilement modifiée mais j’en garde un souvenir meurtri. Ç a m’a appris ce que je considère comme fondamental dans notre profession : notre plus-value est de transformer les émotions de notre client en arguments juridiques. Si l’on peut être dans un premier temps dans l’empathie, il faut ensuite être dans la technique. Alain Provansal : M on souvenir le plus marquant c’est ce que je ne souhaitais pas faire dans la profession d’avocat : ma première plaidoirie. J ’étais plutô t un homme d’écrit, j’avais une bonne capacité de recherches doctrinales et jurisprudentielles, mais j’étais très timide - ça a changé - et n’avais pas du tout le goût de la plaidoirie. Alain Carissimi, mon associé m’a obligé à prendre un de ses dossiers parce qu’il était en déplacement. Il m’a lancé contre un très grand avocat qui s’appelait Roland D epieds et qui, dans notre dossier, représentait la société Renault. J e me suis fait ramasser comme un bleu, j’en ai tremblé pendant deux nuits. Il avait une telle finesse en marchant devant le tribunal de commerce, qu’il vous prenait comme ça et tout d’un coup on se retrouvait par terre sans savoir pourquoi. U n judok a de la plaidoirie, j’en ai ce souvenir épouvantable. Alain, tu fais partie de l’association des avocats honoraires dont tu es le président de la section Provence. Est-ce que tu peux définir ce qu’est un avocat honoraire ? Alain Provansal : L’avocat honoraire est avant tout un avocat. Il est prévu dans la loi de 1971 et a un statut réglementé par le RIN des barreaux. Il s’agit d’un avocat qui prend sa retraite mais désire rester lié à sa profession, désire continuer à pouvoir voter aux élections du Conseil de l’Ordre et du CN B. Il continue à porter la robe, notamment aux enterrements des confrères, mais également lors des rentrées solennelles. Il continue, sur autorisation du bâ tonnier, à donner des consultations et faire des actes. Les avocats honoraires sont sur le tableau de l’Ordre mais dans une colonne particulière. D ans beaucoup de barreaux, les avocats participent aux commissions ordinales. Pour la plupart, nous estimons que nous devons donner à l’Ordre ce qu’il nous a donné. Pour ma part, je suis membre de la commission de RCP ainsi que de la commission séquestre et adjudication. L’association nationale des avocats honoraires est l’unique association représentant les avocats honoraires. Elle permet notamment aux avocats honoraires qui le souhaitent de continuer à vivre une relation de confraternité avec leurs confrères. Elle a également une portée intellectuelle puisque l’association nationale dispose d’un groupe d’études qui dépose des rapports une à deux fois par an. À titre d’exemple, l’un des deux derniers rapports déposés était relatif à l’oralité des débats devant les juridictions civiles et j’en étais le rapporteur. Ces rapports sont envoyés au CN B, à tous les bâ tonniers de F rance, à la Chancellerie. Sylvie, pourquoi avoir choisi l’honorariat ? S y lvie Campocasso : J e souhaitais garder un lien fort avec le barreau. J ’ai exercé pendant 43 ans cette profession avec passion et j’ai conservé à son égard une passion intacte jusqu’au moment où j’ai décidé d’arrêter. Pour moi, ça faisait sens de rester liée au barreau. Ce lien est aussi celui du mot et du livre puisqu’il a été convenu que je continue de diriger le prix littéraire du barreau. Il y a également cette idée de la transmission à laquelle je suis très attachée. J ’ai décidé depuis le 1er janvier d’oublier ce qu’est le droit, en revanche je n’ai pas oublié ce qu’est la profession. Il y a ce sentiment de grande famille au sein du barreau de M arseille et je n’avais pas envie de quitter cette grande famille au sein de laquelle je sais avoir ma place. Que pensez-vous de la cité judiciaire et de sa possible implantation à Arenc ? Léa F rancesch i : J e pense que la profession a des besoins, mais qu’il faut aussi penser au fait que les avocats sont installés dans le centre historique depuis toujours et que leur départ entraînera nécessairement des conséquences économiques, sur les commerces de proximité par exemple. Il est fort probable qu’une partie des cabinets reste en centre-ville et qu’une partie se déplace vers la J oliette et je crains que l’on se retrouve divisé. Q uand on est élève-avocat stagiaire ou même avocat, c’est toujours agréable de pouvoir se retrouver le midi ou en sortie de cabinet, ou même seulement se croiser sur le chemin et échanger quelques mots. Cela contribue et fait à mon sens partie de la confraternité du barreau que j’évoquais tout à l’heure. Se posera sûrement aussi un problème de perte importante de temps dans les transports, notamment pour les cabinets qui choisiront de rester à leur emplacement actuel. F lorent O liver : J e suis d’accord avec Léa. J e pense que l’esprit de confraternité qui fait qu’on se voit, qu’on se connait, qu’on déjeune ensemble, existe aussi parce qu’on est relativement regroupé. Après, que les juridictions soient rassemblées, je pense que ça peut être une bonne chose dans l’absolu. Q uand on mutualise les moyens sur un seul lieu, en termes de contraintes DOSSIER 31 | JDB MARSEILLE 2 / 2023 [ J ’étais plutô t un h omme d’écrit, j ’avais une bonne capacité de rech erch es doctrinales et j urisprudentielles, mais j ’étais trè s timide - ç a a ch angé - et n’avais pas du tout le goû t de la plaidoirie. ] ALAIN PRO V AN S AL

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