Journal du Barreau de Marseille
numéro 4 - 2016
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C
omme vous le savez, l'article L. 442-6, I, 5° du
Code de commerce dispose : « Qu’engage
la responsabilité de son auteur et l'oblige à
réparer le préjudice causé le fait, par tout produc-
teur, commerçant, industriel ou personne immatricu-
lée au répertoire des métiers : de rompre
brutalement, même partiellement, une relation com-
merciale établie, sans préavis écrit tenant compte de
la durée de la relation commerciale et respectant la
durée minimale de préavis déterminée, en référence
aux usages du commerce, par des accords interpro-
fessionnels [...].
On précise souvent qu’en cette matière, une procé-
dure d’exception doit obligatoirement s’appliquer,
avec des compétences territoriales et une procé-
dure d’appel spécifiques, que cela ne souffrirait d’au-
cune exception. Je ne partage pas forcément cet
avis et je vais tenter, dans ces quelques lignes, dé-
montrer pour quelles raisons.
Il est vrai que le décret n° 2009–1384 du 11 novem-
bre 2009 a instauré un nouvel article D 442-3 du
Code de commerce qui dispose : « Pour l'application
de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridic-
tions commerciales compétentes en métropole et
dans les départements d'outre-mer sont fixés
conformément au tableau de l’annexe 4-2-1 du pré-
sent livre. La cour d'appel compétente pour connaî-
tre des décisions rendues par ces juridictions est
celle de Paris. »
L’annexe 4-2-1 du Code de commerce dispose :
« Juridictions commerciales compétentes en appli-
cation de l'article L. 442-6 du code de commerce
des procédures qui sont applicables aux personnes,
commerçants ou artisans
A la première lecture de ces textes, on serait effecti-
vement tenté de dire que seules les juridictions
consulaires listées seraient compétentes pour tran-
cher les litiges concernant les ruptures brutales des
relations commerciales et de ce fait seule la Cour
d’appel de Paris pourrait connaître de l’appel. Toute-
fois, ces textes ont, comme j’ai pu le dire, instauré
une procédure d’exception, et par l’adage ici l’adage
« exceptio est strictissimae interpretationis », soit les
exceptions s’interprètent strictement, et en vertu de
ce principe ce n’est pas forcément le cas. Afin de dé-
montrer mes propos, je vais partir d’un cas concret.
Imaginons qu’une société et une association entre-
tiennent depuis plusieurs années, des relations d’af-
faires suivies et que la société décide d’y mettre un
terme, sans préavis, sans indemnité. Il sera rappelé
POINT DE VUE SUR LA PROCÉDURE APPLICABLE
AUX RUPTURES BRUTALES
DES RELATIONS D’AFFAIRES SUIVIES
Chers amis, cela faisait longtemps…
Et oui, même si cela fait maintenant près de trois années que j’ai
quitté les rives ensoleillées de la Méditerranée pour celles plus
grises de la Seine, je ne vous ai toujours pas oubliés et c’est
toujours un plaisir de reprendre la plume pour le journal demon
premier barreau d’appartenance, je pourrais dire mon barreau,
celui de Marseille. Mais reprenons le fil du présent article relatif
au contentieux des ruptures brutales des relations commer-
ciales et plus précisément à la procédure d’exception qui leur
est applicable.
MATHIEU CROIZET
AVOCAT AU BARREAU DE PARIS
CONSEIL AUPRÈS DE LA COUR PÉNALE
INTERNATIONALE DE LA HAYE
ET AUPRÈS DU TRIBUNAL SPÉCIAL
POUR LE LIBAN
LIBRES PROPOS