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Journal du Barreau de Marseille

numéro 2 - 2016

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choix de sa forme sociale qui conditionnera son régime de

retraite. Mais si une machine peut aujourd’hui battre un

champion de jeu de Go, il faut bien mesurer que les pres-

tations informatisées en ligne seront demain beaucoup

plus performantes qu’aujourd’hui et répondront de façon

parfaitement satisfaisante à beaucoup plus de besoins de

conseils exprimés par les particuliers comme les entre-

prises. Sur un certain nombre de problématiques, l’avocat

est à moyen terme remplaçable par des solutions numé-

riques, de la même façon que les employés des greffes des

tribunaux de commerce seront demain largement rempla-

cés par des services de formalités en ligne qui deviennent

chaque jour plus performants et pratiques.

La déontologie des avocats est-elle un frein ou un

atout pour conquérir lemarché du droit sur inter-

net ? comment envisagez-vous l’évolution de la

déontologie sur Internet dans les 5 prochaines

années ?

Notre déontologie est réellement une force pour affirmer

notre supériorité dans le conseil sur le Web. C’est précisé-

ment notre principale valeur ajoutée car le respect des rè-

gles est contrôlé par les Ordres et nous sommes

indéfiniment responsables de nos fautes ou erreurs dans

l’accomplissement de nos mis-

sions pour lesquelles nous

sommes

assurés.

Notre

éthique ne procède donc pas

de déclarations d’intention

mais d’un corpus de règles co-

hérentes qui visent avant tout à

protéger les justiciables, mais qui protègent également

notre profession par une exigence forte et permanente.

Dans les 5 ans qui viennent, l’enjeu n’est pas pour moi

l’évolution de nos règles qui s’adaptent très bien au

monde numérique, mais dans le contrôle du bon respect

de ces règles par les Ordres dont c’est la mission première.

Comment en effet assurer dans le temps le contrôle des

sites web, des blogs, des réseaux sociaux ou des cam-

pagnes de « sollicitations personnalisées » lancées par

certains cabinets alors que les ordres voient fondre leur

moyens du fait de la baisse des produits financiers des

CARPA ? Il faut donc compter sur l’autodiscipline, ce qui

implique d’informer les confrères et de les former à la

bonne utilisation du numérique.

Notre déontologie est notre premier et meilleur argu-

ment commercial et le CNB la fait évoluer tranquille-

ment, sans qu’il faille envisager un bouleversement de

nos règles professionnelles pour s’adapter au numérique.

Mais les avocats sont encore trop peu nombreux à s’inter-

roger sur la conformité de leurs pratiques en matière de

communication électronique et de prestations dématéria-

lisées. Nos règles professionnelles ne visent à interdire à

l’avocat l’exercice dématérialisé de sa profession, mais à

encadrer cette nouvelle forme d’exercice, en guidant les

avocats vers les bonnes pratiques en la matière.

D’après vous comment concurrencer

les « legal start-up » ?

En refusant d’être utilisés par les legals-ups qui ne doivent

être que des sous-traitants des avocats et non l’inverse.

Trop souvent ces sociétés commerciales s’appuient sur le

nom et l’image de quelques avocats pour légitimer leurs

activités et leur communication, au risque de rendre les

avocats concernés complices d’un exercice illégal du droit.

A l’inverse, pourquoi un avocat ne s’adjoindrait-il pas les

services d’une start-up pour proposer des services en

lignes en achetant ou louant une plateforme web élaborée

par une start-up, sous réserve de s’assurer que le fonction-

nement de celle-ci répond aux exigences de notre déonto-

logie ? Beaucoup d’avocat payent chaque mois un « loyer

» pour utiliser les services d’un logiciel de gestion ou avoir

accès à de la documentation en ligne : appliquons la

même logique aux outils développés par les legals-ups qui

doivent devenir des fournis-

seurs de services aux avocats

et non leur concurrents.

Bien sûr il y a le coût de déve-

loppement de ces outils logi-

ciels qui peut être un frein,

mais c’est alors aux institutions de notre profession de

proposer des solutions mutualisées permettant à tous les

avocats d’avoir accès àces outils. L’American Bar Associa-

tion a récemment passé un accord avec l’une des plus im-

portantes legals-ups afin de développer une offre destinée

à faciliter la mise en contact des avocats avec les entre-

prise recherchant un conseil. En France, la plateforme

consacrée aux actions conjointes (2) lancée par l’Ordre de

Paris en octobre 2015 est accessible à tous les avocats du

barreau et marche très bien, en faisant une redoutable

concurrence aux plateformes similaires lancée par des so-

ciétés commerciales. Le CNB lance de son côté un site de

référencement qui devrait vite devenir une référence au

détriment des sites de référencement commerciaux et

autre sites « comparateurs » dont certains sont totale-

ment truqués. Le label donné par nos ordres est très ras-

surant pour le public et démontre tout le potentiel des

avocats s’ils veulent bien s’organiser et tirer parti de la

force économique que représentent 66.000 professionnels

partageant une déontologie commune.

RÉVOLUTIONS NUMÉRIQUES

ET INNOVATIONS DES AVOCATS

DOSSI ER

Notre déontologie est notre premier et

meilleur argument commercial