JDB N1 2020

DOSSIER MARD Du point de vue des avocats, il est une idée répandue. L’accompagnement en médiation serait moins rémunérateur qu’une procédure contentieuse. C’est une idée fausse. Tout d’abord il faut rappeler qu’un avocat peut facturer un honoraire de résultat quand il accompagne son client en médiation, le ré- sultat étant que la médiation aboutisse à un accord de sortie de crise. C’est ici l’occasion de rappeler qu’un accord de médiation est un accord qui répond aux intérêts, préoc- cupations et besoins des parties, car ce sont les parties elles-mêmes qui déterminent les solutions à leur conflit, avec l’aide du média- teur. Alors que le procès tranche et touche au passé, la médiation permet de recons- truire une relation et touche à l’avenir. Une médiation qui aboutit à un accord satisfera nécessairement le client. ENMOYENNE, 70 % DESMÉDIATIONS SE TERMINENT PARUNACCORD. Ainsi, un avocat qui accompagne son client en médiation a 70 % de chances de voir son client satisfait, et de pouvoir facturer un honoraire de résultat s’il l’a prévu dans sa convention d’honoraires. Last but not least, il fidélisera son client. Et ce, d’autant plus qu’un accord issu d’une médiation est, dans la très grande majorité des cas, exécuté spontanément, car choisi et décidé par les parties. En responsabilisant les parties à un différend, la médiation permet d’éviter deux aléas qui se conjuguent : l’aléa judiciaire, souvent pris en compte et mesuré, mais aussi l’aléa procédural rarement évoqué. En effet, la complexification des règles pro- cédurales génère cet aléa supplémentaire. Pour preuve, les statistiques sur la sinistralité notamment en raison des erreurs de procé- dure en appel . Prise sous un autre angle, la responsabilité des avocats sera-t-elle un jour engagée pour défaut de conseil sur l’exis- tence de modes amiables ? L’article 21-3-7-1 intègre cette information dans le devoir gé- néral de conseil de l’avocat, et certains sont prêts à parier que oui, demain ce sera le cas. Nous vivons un changement de paradigme qui doit conduire les avocats à faire évo- luer leur pratique. La posture guerrière du procès ne doit pas, ne doit plus être la seule option proposée par l’avocat à son client. L’avocat doit véritablement intégrer les MARD dans sa stratégie de prise en charge d’un différend. COMBIENCOÛTE UNEMÉDIATION? La rémunération du médiateur est libre, tant dans son quantum que dans ses mo- dalités : forfait pour un nombre d’heures définies, honoraires au temps passé, mix. La transparence doit être de mise. Une conven- tion d’entrée en médiation doit être signée au plus tard le jour de la première réunion de médiation. En revanche, il est unanimement admis en France qu’un médiateur ne peut pas facturer d’honoraires de résultat. Enfin, le principe est un partage des hono- raires à parts égales entre les parties. Ce- pendant, les parties peuvent décider d’une répartition différente. En tout état de cause, le coût d’une médiation devra tou- jours être posé au regard du service rendu par le médiateur : - du point de vue quantitatif en intégrant bien tous les coûts, y compris les coûts ca- chés (rarement identifiés et mesurés), - du point de vue qualitatif avec la perspec- tive de la préservation ou de la reconstruc- tion d’une relation, - et enfin le gain du temps. Une médiation dure en moyenne par exemple 15 heures dans le domaine commercial. ENCONCLUSION Voici une belle formulation de ce qu’est la médiation, selon Charles Jarrosson : « La médiation n’est pas seulement une alter- native aux règles de procédure, mais égale- ment aux règles de fond : c’est un moyen extrajudiciaire et extrajuridique de règle- ment des conflits. […]. Le droit met fin au litige […], mais il laisse souvent subsister une situation conflictuelle ; la médiation extirpe le conflit. L’accord se fait sur une solution que les parties ressentent comme juste ; en ce sens, la médiation est un mode privé de recherche du juste. » A méditer… 1. Ces sinistres représentaient 24,7 % des si- nistres déclarés en 2018, presque autant que le défaut de diligences (26,3 %). 2. 21.3.7.1 L’avocat doit essayer à tout mo- ment de trouver une solution au litige du client qui soit appropriée au coût de l’affaire et il doit lui donner, au moment opportun, les conseils quant à l’opportunité de rechercher un accord ou de recourir à des modes alternatifs pour mettre fin au litige. 3. Seuls les médiateurs familiaux convention- nés CAF ont une grille tarifaire Question abrupte, mais question légitime. Une autre façon de dire : ai-je intérêt à investir dans une médiation? Un médiateur corrigerait : m’investir dans une médiation. Une fois énoncée la question, de quel point de vue se place-t-on? Du point de vue du client, celui qui vit le différend? Ou du point de vue de son conseil, l’avocat? Là se pose une question sous-jacente : la convergence des intérêts de l’avocat et de son client … PASCALE HEBÄCKER AVOCAT ET MÉDIATEUR PRÈS LA COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE Les MARD, combien ça coûte, combien ça rapporte? 41 1ER SEMES TRE 2020 JOURNAL DU BARREAU DE MARSE I L LE

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