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4 | JDB MARSEILLE 3 / 2022 LE MOT DU BÂTONNIER soulève de nombreuses interrogations car nous ne sommes pas suffisamment associés au projet. Historiquement la justice s'est toujours rendue au cœur de la ville, lieu qui fédère l'ensemble des forces de la cité et qui est un point de ralliement naturel pour tous ses habitants. Le lieu où s’exerce la mission de justice n’est pas anodin, on aurait tort de croire qu’une tour de verre placée là, simplement parce qu’il y a un terrain disponible va guérir nos maux de justice. Notre mémoire collective est empreinte de symboles. Aux origines, la justice devait être rendue sur lamontagne à son sommet et à l’ombre d’un chêne. L’arbre était identifié comme le pilier du monde, les branches vers le ciel et les racines bien ancrées dans la terre. N’oublions jamais que l’État et de facto la justice ont un pouvoir exorbitant qui est celui du droit de juger son semblable, s’arroger ce droit doit s’accompagner de la conscience d’en être que de simples dépositaires, l’État et la Justice ne rendent que ce qu’on leur a confié dans l’intérêt commun. Les symboles sont vivaces, le « palais », le « parquet », les représentations du glaive et de l’épée attributs de Némésis, déesse grecque de la vengeance… l’architecture et l’emplacement de là où se rend la justice ne sont pas simplement des bâtiments de pierres et de ciment. L’emplacement est également chargé de symbole et d’attachement pour tout citoyen. AMarseille, le tribunal judiciaire se situe près du Vieux-Port et il est proche à la fois de la préfecture et de la mairie qui sont tous les symboles forts de la République française. Passer devant notre palais de justice suscite le respect, la crainte, l’angoisse, l’incompréhension… Le palais interroge. C’est un impératif, pour qu’une puissance soit pérenne, on se doit de susciter l’interrogation et l’intelligence des citoyens. L’adhésion à une force n’est pas automatique, elle se cultive. Dans le monde où nous vivons, je constate la perte de sens autour de moi, l’anéantissement des symboles un à un, nous voulons faire table rase de notre passé, notre histoire, l’ancien monde était trop ceci, trop cela, pas assez comme ça… nous voulons repartir de zéro en zappant et nous voulons le faire vite, très vite… Je ne suis pas ancré dans le passé, bien au contraire, je prône un modernisme, je suis pour l’évolution intelligente et collective de nos institutions, mais je suis contre tout raser, je suis contre l’abolissement de tous les repères de notre société. On ne peut pas brader une fois de plus la justice trop souvent délaissée. Je déplore qu’on occulte le principe essentiel qui est que la justice soit rendue «au nom du Peuple Français » en ne mettant pas le citoyen au cœur de ce projet. Aujourd’hui nous ne disposons pas d’assez d’éléments, toutefois il semblerait que la construction de cette grande cité de 40000 m² serait difficilement réalisable en centre-ville, il n'y aurait pas de lieu adapté. C’est la raison pour laquelle de nombreuses autres solutions sont actuellement étudiées. À l'heure où le centre-ville historique de Marseille connaît des difficultés économiques importantes et où des initiatives sont prises pour lui redonner un attrait, le départ de toute la famille judiciaire pourrait ruiner et achever définitivement ce cœur de la ville. Marseille est la ville la plus embouteillée d'Europe et le déplacement de ce tribunal loin du centre-ville sans accès permettant de s'y rendre aisément serait ici, plus qu'ailleurs, source de nombreux problèmes. Là encore on va vite trop vite. Pour toutes ces raisons, les premières propositions d'implantation de la cité judiciaire hors du centre-ville ne peuvent pas recevoir l'approbation du barreau. Actuellement, nous discutons avec les élus locaux et nationaux ainsi qu'avec les associations de commerçants et toutes celles et tous ceux qui sont intéressés par cette question. Les avocats qui se déplacent quotidiennement au sein des juridictions se battront donc pour faire entendre leur voix et leur position, le bâtonnier élu et moi-même sommes, en tout point, en phase sur cette position. Le deuxième point d’actualité, symbole auquel nous sommes particulièrement attachés, concerne la Maison de l’avocat. Elle est le lieu de l’organisation des services collectifs de notre barreau, de rencontres et d’échanges confraternels entre nous. Le barreau de Marseille a pu travailler sur l’état de son patrimoine immobilier au cours de ces dernières années. Historiquement nous le savons, la maison de l'avocat était propriétaire du bloc comprenant l'immeuble côté rue Grignan et l'immeuble arrière côté rue Montgrand, ces deux bâtiments étant reliés par le couloir des boîtes et le patio. Au fil des années, ce patrimoine s'est dégradé notamment l'immeuble arrière situé rue Montgrand dont les toitures étaient dans un état de vétusté important générant de nombreuses infiltrations et dégradations dans la plupart des salles et bureaux

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